Le 4 juillet 2022, nous demandions le placement de la carrière Arnaudet de Meudon sous le régime de l’instance de classement au ministère de la Culture, par ailleurs propriétaire d’une partie du site. Cette lettre, restée à ce jour sans réponse, est reproduite ci-dessous avec son annexe identifiant les principales galeries dont le comblement est prévu.
Paris, le 4 juillet 2022
Objet : demande de placement sous instance de classement des galeries de la carrière Arnaudet de Meudon
Madame la Ministre,
Depuis trois mois, une grande émotion se manifeste à Meudon et au-delà devant la perspective du comblement de la carrière Arnaudet, décidé par le maire de cette ville.
Cette carrière, creusée à partir de 1872, sur trois niveaux et sur un plan quadrillé, est un chef d’œuvre du patrimoine industriel. On a parlé de cathédrale industrielle, en raison des voûtes d’arêtes des galeries, d’une finition étonnante (car parfaitement « peignées ») et qui atteignent jusqu’à 8 mètres de haut.
L’ensemble des galeries, passionnantes également au point de vue géologique et paléontologique, avaient été classées au titre des sites par le Premier ministre et la ministre de l’Environnement en 1986. Le ministère de l’Écologie a autorisé en 2019 leur comblement pour des raisons de sécurité sur la base d’analyses contestées par de nombreux spécialistes en géologie structurale.
Pour dénoncer cette destruction programmée, une trentaine d’associations, notamment du patrimoine, locales et nationales, parmi lesquelles Sites & Monuments, ont organisé trois manifestations et une conférence de presse à Meudon, toutes abondamment relayées par les médias.
Ces dernières semaines, de nombreux articles et reportages ont été consacrées à ces carrières, dans des revues d’architectures (Chroniques d’architecture, D’Architectures), de défense du patrimoine (Le Journal des arts, La Tribune de l’art), dans des médias culturels (Arte, Télérama, France Culture à deux reprises), sans parler des médias généralistes (France Inter, Le Parisien, Le Journal du dimanche, Médiapart, FR3, BFM) ; dans l’ensemble, tous ces médias ont condamné cette décision du maire de Meudon. Une tribune intitulée « Patrimoine : il faut sauver les carrières classées de Meudon » a été publiée dans Le Figaro et signée par de nombreuses personnalités du monde de la culture, Stéphane Bern, Jean Clair, Bruno Solo, Philippe Gloasguen, Jacques Expert, Roseline Granet.
Cette destruction de la carrière de Meudon a aussi été évoquée lors d’une séance de l’Académie des Beaux-Arts et de nombreux académiciens, Hugues Gall, Adrien Goetz, Jean Anguera, Jean-Michel Othoniel, Dominique Perrault, Dominique Issermann ont témoigné leur opposition à ce comblement, notamment en signant une pétition.
Nous nous permettons de vous rappeler que le ministère de la Culture est toujours considéré comme propriétaire de plus de 20% des galeries. Ainsi, le fait qu’il participe - y compris financièrement - à la destruction de ce patrimoine commun des Français choque.
Au lieu de consacrer tant d’argent à l’anéantissement de cet héritage unique, situé sous le musée des ateliers de Rodin, un programme de valorisation des carrières et du site naturel de la colline devrait être conçu et réalisé.
Ces vastes carrières sont malheureusement considérées depuis trop longtemps comme une gêne par votre ministère, qui tente en vain d’en rejeter la propriété sur d’autres. Elles pourraient pourtant être associées à la visite du musée par des projections, une présentation d’œuvres de Rodin, etc. Ce complément de visite serait parfaitement cohérent tant les carrières Arnaudet - contemporaines de l’installation de Rodin - sont liées au travail du sculpteur par les volumes qu’elles laissent voir, les traces d’outils qu’elles révèlent et les matériaux qui en étaient extraits. Leur ouverture au public, nécessitant l’aménagement d’un nouvel accès depuis le musée, changerait sans doute tout à sa fréquentation.
Aussi, nous sollicitons aujourd’hui le placement sous instance de classement de l’ensemble des galeries de la carrière Arnaudet. Cette mesure est urgente puisque les travaux préparatoires au comblement battent leur plein et que le comblement va débuter très bientôt.
Nous restons à votre disposition pour toute information complémentaire et vous prions de croire, madame la Ministre, en l’expression de notre haute considération.
Julien Lacaze, président de Sites & Monuments
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