C’est une belle victoire pour la transparence administrative en matière d’implantation de parcs éoliens.
Les préfets s’abritent en effet souvent derrière la notion d’acte administratif en préparation pour s’opposer à la communication des dossiers qui leur ont été soumis par les industriels. Ainsi, le préfet du Var avait opposé un refus tacite à notre demande formée par lettre du 5 juillet 2021, refus qu’il explicitait dans Le Figaro en jugeant que "les pièces n’ont pas a être communiquées à ce stade de la procédure".
Or, la convention d’Aarhus de 1998 met à la charge des états signataires (la France a ratifié ce texte en 2002) des obligations de transparence renforcées.
Ce traité a en effet été transcrit dans la Charte de l’environnement, elle-même intégrée à notre bloc de constitutionnalité. La Charte prévoit notamment que "Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement" (art. 7).
C’est en application de ce texte à valeur constitutionnelle que les articles L. 124-2 et L. 124-3 du code de l’environnement prévoient que "Toute personne qui en fait la demande reçoit communication des informations relatives à l’environnement détenues par : 1° L’État" et, qu’ainsi, "est considérée comme information relative à l’environnement [...] toute information disponible, quel qu’en soit le support, concernant : 1° L’état des éléments de l’environnement, notamment l’air, l’atmosphère, l’eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels [...] 3° L’état de la santé humaine, la sécurité et les conditions de vie des personnes, les constructions et le patrimoine culturel, dans la mesure où ils sont ou peuvent être altérés par des éléments de l’environnement, des décisions, des activités ou des facteurs mentionnés ci-dessus".
La Commission d’accès aux documents administratifs (CADA), saisie par lettre du 30 août 2021, accueille cette interprétation des textes en rappelant que "les informations relatives à un projet tel que l’installation d’un parc d’éoliennes, notamment les décisions conditionnant sa réalisation, constituent des informations relatives à l’environnement, au sens de l’article L 124-2 du code de l’environnement, eu égard aux incidences que de telles installations sont susceptibles de comporter pour des éléments tels que les paysages et les sites naturels, mentionnés au 1° du même article, ou, le cas échéant, au voisinage de ces installations, pour les conditions de vie des personnes, mentionnées au 3° de cet article" et, qu’en conséquence, "les documents achevés que détient l’administration et qui sont relatifs à un projet de création d’un parc éolien, sont communicables, à tout moment, à toute personne qui en fait la demande", alors même qu’ils prépareraient une décision administrative future.
Craignant très probablement une nouvelle médiatisation de son refus, la préfecture du Var a choisi de se conformer à l’avis de la commission, nous évitant ainsi d’avoir à saisir le tribunal administratif (voir ici).
La préfecture aura cependant su profiter de 6 mois d’avance sur les défenseurs de Sainte-Victoire, puisque les études communiquées par le promoteur sont à la disposition de ses services depuis le début du mois de juin 2021.
Julien Lacaze, Président de Sites & Monuments
Avis CADA n°20215553 du 4 novembre 2021