L’Association pour la Défense et le Développement du Haut-Nivernais (ADDHN) a été fondée en avril 2010. Ses objectifs sont la préservation et la défense des paysages et des espaces naturels, incluant faune et flore, la protection du patrimoine architectural et de son environnement. Elle a aussi pour ambition d’être une force de proposition à la disposition des collectivités locales pour une meilleure valorisation de leur territoire, dans le respect de l’environnement.
Son champ d’action s’étend aux communes des canton de Tannay (20 communes représentant environ 3000 habitants) et de Brinon (20 communes totalisant environ 2400 habitants) et, en tant que de besoin, aux communes limitrophes.
Localisation du projet éolien
Depuis sa création, l’ADDHN lutte contre l’installation d’un parc éolien, prévu au cœur de ce patrimoine paysager et culturel. Ce parc comprendrait 7 éoliennes de 150 m en bout de pales, et serait installé au milieu de la forêt qui domine Tannay à l’ouest.
Outre ses effets sur la biodiversité, l’impact visuel du projet serait très important y compris sur un périmètre éloigné. C’est ce qui justifie le fait que, par trois fois, la préfecture ait refusé le projet. Cependant, contre toute attente, le permis de construire vient d’être accordé, par arrêté préfectoral du 28 juillet 2019.
Au-delà des impacts évidents d’un tel projet au plan local, et notamment sur le site de Cervenon, sur les châteaux proches de Pignol et de Lys, et sur la Collégiale de Tannay, on peut s’attendre à un impact fort sur les paysages et les sites dans un rayon de 20 km autour des éoliennes, compte tenu de leur hauteur et de leur implantation au sommet de la colline, à une altitude de 350 m.
Un paysage d’une qualité reconnue
Le Haut-Nivernais, défendu par l’association, se caractérise par un ensemble de bocages et de collines boisées, zone de transition entre la vallée de l’Yonne et les premiers contreforts du Morvan. Selon l’Atlas des paysages, « Le relief ondulé régulièrement y forme de vastes moutonnements (300 à 400 mètres d’altitude), assimilable à une mer agitée par la houle. Cette répétition de petites collines charme l’œil et donne une grande homogénéité au paysage. Dans ce paysage bien structuré et graphique, les exploitations agricoles, formant des petits hameaux ou plus isolées, donnent l’impression d’un paysage vivant et habité. »
Ce paysage est traversé par des chemins de randonnée inscrits au "plan départemental des itinéraires de promenade et randonnée". Ils ont ainsi pour objectif de favoriser la découverte de sites naturels et de paysages ruraux. Cette démarche d’inscription des chemins permet de valoriser, pour les générations futures, un patrimoine naturel exceptionnel, source de développement.
Ce paysage ordinaire de grande qualité est émaillé de points d’intérêt particuliers tant monumentaux que naturels.
Des points d’intérêt patrimoniaux
La Nièvre, dans sa totalité, totalise plus de 330 immeubles protégés au titre de monuments historiques (dont 1/3 classés et 2/3 inscrits). Le territoire étendu concerné par l’ADDHN (2 cantons et communes limitrophes) comporte 22 édifices classés et 65 édifices inscrits. Il s’agit de constructions de nature et d’époques diverses : églises, abbayes, chapelles, châteaux, maisons anciennes et fermes fortifiées, croix... Ces édifices sont implantés au cœur des villages du secteur, d’autres dans des sites agricoles ou naturels.
La proximité du projet de plusieurs monuments historiques (château de Pignol à 1800 m, château de Lys à 2400 m, collégiale de Tannay à 2500 m notamment) est particulièrement préoccupante.
Le projet est également situé non loin du Château de Blanchefort à Asnois ou de celui de Saint-Pierre-du-Mont, à 8 km à l’ouest de Tannay. Tout proche se trouve aussi un ensemble remarquable de fermes anciennes : l’Allemande (XVIe siècle), Chassy-le-Bas (XIVe et XVIe siècles), ainsi que plusieurs anciens moulins sur l’Yonne... Au total, plus de 80 sites et monuments remarquables dans un rayon de 20 km autour du projet seraient à des échelles diverses impactés.
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Depuis le château de Pignol (Tannay), inscrit au titre des monuments historiques par arrêté du 7 décembre 1972 et ouvert au public, les machines projetées seraient, pour une partie d’entre elles, nettement visibles, compte tenu de leur faible éloignement et surtout de leur hauteur (150 mètres) et de leur implantation à une altitude bien supérieure à celle du monument (la différence d’altitude oscille entre 55 et 115 mètres).
Il en ira de même pour le domaine de Lys (commune de Lys), entièrement protégé au titre des monuments historiques, notamment en ce qui concerne le château, sa chapelle et le parc. L’ensemble fait l’objet d’une restauration importante depuis 7 ans, avec le soutien de l’État, et est ouvert au public.
Encore plus proche du parc projeté, le petit village de Cervenon sera totalement cerné par les éoliennes, qui, de leur hauteur, domineront la totalité du patrimoine bâti, induisant une sensation d’écrasement et d’intrusion insupportable.
L’Architecte en chef des Monuments Historiques considère ainsi, dans une missive adressée à notre association datée du 30 janvier 2018, qu’
De nombreux sites protégés
Ces monuments s’insèrent dans un précieux paysage. On dénombre ainsi, dans ou à proximité de l’aire d’étude du projet, pas moins de 6 sites classés et 16 sites inscrits (données DREAL Bourgogne).
Une meilleure photo ?
On pense notamment au site classé du sommet de la colline de Metz-le-Comte, à 6 kilomètres du parc, offrant un panorama à 360° et au site inscrit du village de Lys, situé à seulement 2 kilomètres du parc.
Parmi ces sites figure également la butte de Montenoison, qualifiée par l’Atlas des paysages de la Nièvre de « site historique et point de repère incontournable » (p. 184) et de « belvédère remarquable » (p. 166). Cette butte offre en effet un très large panorama vers le Nord et l’Est sur les plateaux de Basse-Bourgogne (cf. étude paysagère, p. 90). Bien qu’éloigné de 16 kilomètres, les 7 éoliennes autorisées seront parfaitement visibles à l’horizon depuis le sommet de la butte.
Elles seront également visibles depuis le Mont Sabot, autre site classé, couronné par la chapelle Saint-Pierre et depuis lequel s’offrent des vues lointaines. Le projet sera aussi visible depuis les coteaux de la vallée de l’Armance, alors que l’observateur y jouit d’une vue sur le village de Maison-Dieu, dont l’église se détache, avec, en arrière-plan, la butte de Metz-le-Comte, site classé, comme sur le Mont Beuvron. Le projet sera également visible depuis les coteaux d’Anthien, d’Authiou et de Champagne, lesquels offrent des vues dominantes et panoramiques sur la plaine bocagère.
Le parc éolien sera également situé à proximité immédiate de l’Yonne et du canal navigable du Nivernais. Le département a pourtant fait un effort considérable d’aménagement des bords de ce canal. Une piste cyclable y a été créée, notamment entre Cuzy et Tannay, pour faciliter les activités des plaisanciers. Par ailleurs, la commune de Lysa a procédé, à grands frais, à l’enfouissement de tous ses réseaux téléphoniques et électriques aériens. Est-ce pour élever maintenant d’immenses mâts à quelques centaines de mètres de son église, de sa chapelle et de son château, qui tous sont classés ?
La toute proximité de Vézelay et du chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle
Tannay et sa colline boisée sont à l’emplacement même des Chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle (GR 654). Cet itinéraire a été inscrit par l’UNESCO au patrimoine mondial de l’Humanité en 1998. La dénaturation de ce chemin par l’implantation d’éoliennes de 150 mètres de hauteur lui fera perdre sa beauté et son potentiel économique.
Concernant la basilique de Vézelay, classée avec sa colline au patrimoine mondial depuis 1979, le promoteur lui-même reconnaît que le parc, bien que distant de 20 km, pourrait être visible depuis le parvis de la basilique, notamment de nuit LE CITER en reproduisant le document. Le dossier minimise cependant au maximum les effets du projet. Une contre-étude, réalisée par l’ADDHN, montre clairement l’impact du projet sur le site de la basilique.
A partir du clocher, situé à une altitude de 333 m, toutes les éoliennes seraient visibles, dans des proportions allant de 90%, pour la plus proche (E7), à 70% pour la plus éloignée (E1).
Or, le clocher de la basilique, après restauration, permettra aux visiteurs de jouir, comme par le passé, d’un panorama exceptionnel sur toute la région. Ce sujet est hautement sensible et l’UNESCO a alerté les autorités françaises du risque de déclassement CITER ce document en le reproduisant de la basilique et de la colline de Vézelay du Patrimoine Mondial, si les autorités françaises ne manifestent pas plus d’intérêt pour la protection de ce site exceptionnel.
Conclusion
L’ADDHN a engagé un difficile combat depuis maintenant plus de dix années contre un projet éolien fort coûteux dont l’utilité énergétique est très discutable (à titre de comparaison, le parc éolien de Clamecy-Oisy, distant d’environ 12 km de Tannay, ne produit que la moitié de l’électricité initialement prévue !)
Chose certaine, si ce projet se réalise, son impact sur les paysages environnants et sur les nombreux sites et monuments historiques de la région sera majeur.
L’ Architecte des bâtiments de France (ABF) de la Nièvre avait du reste émis un avis réservé sur le projet, le 3 février 2015, compte tenu notamment :
Souhaitons que la raison prévale en définitive...
André Mériaux, trésorier de l’ADDHN, association adhérente de Sites & Monuments