Un paysage emblématique du Limousin …
Les Monts d’Ambazac font partie des Monts de la Marche, dans le nord de la Haute-Vienne et s’étendent sur une quarantaine de km, d’est en ouest, au nord de Limoges.
Ils sont bordés, au nord comme à l’ouest, par des zones planes, caractéristiques de l’Indre, de la Vienne et de la Charente et constituent les premiers contreforts occidentaux du massif central.
Ainsi, avec une altitude qui varie entre 500 et 700 m, la crête emblématique des Monts d’Ambazac, au nord du massif, forme le premier relief marqué que l’on rencontre en descendant de Paris vers Toulouse, par l’autoroute A20.
Ce massif, encore très préservé, est largement boisé de feuillus et de résineux, en alternance avec des prairies, où paissent les fameuses vaches limousines et des lacs, comme le lac de Saint Pardoux, à l’est des Monts. Dans le fond des valons, on trouve de très nombreux cours d’eau, à l’image de la vallée de la Gartempe (zone NATURA 2000) et des zones humides telles que celle de la réserve nationale de la tourbière des Dauges (zone NATURA 2000).
… menacé par un projet éolien incohérent
Malheureusement, ce paysage typique du Limousin risque de souffrir de la présence d’éoliennes géantes.
En effet, la société EDPR a déposé, en avril 2018, une demande d’autorisation pour la construction et l’exploitation de 5 éoliennes de 180 m de haut, qui viendraient prendre place au sommet de cette crête, au-dessus du village de Bersac-sur-Rivalier.
Pourtant, le schéma régional éolien du Limousin de 2013 (1) définissait l’emplacement précis choisi par EDPR comme défavorable pour l’implantation d’éoliennes, du fait d’un impact trop important vis-à-vis des sensibilités patrimoniales et paysagères.
L’implantation d’éoliennes de 180 m de haut sur ce site, soit à une altitude de 550 m, induirait en effet une co-visibilité à plus de 30 km et sur près de 360 °, soit depuis une surface équivalente à près de la moitié du département de la Haute-Vienne, sans commune mesure avec les autres projets actuellement à l’étude dans le département.
Il faut également prendre la mesure que la hauteur de ces machines excéderait le dénivelé entre le sommet de la crête à cet endroit précis et les zones planes qui bordent la vallée de la Gartempe au nord, ce qui aurait pour effet d’annuler la valeur emblématique de cette crête, vitrine des Monts d’Ambazac, à longue distance et d’augmenter l’effet de surplomb pour les hameaux à proximité.
De même, le puy de Sauvagnac (également appelé signal de Sauvagnac), point culminant des Monts d’Ambazac, avec ses 701 m, serait dépassé par les 5 éoliennes, situées à seulement quelques km.
Deux monuments seraient impactés par le projet : l’église de la nativité (XIIIe-XVIe siècles), classée au titre des monuments historiques (voir ici), dans le centre bourg de Bersac-sur-Rivalier, surplombée par les éoliennes situées à seulement 2 km et le château du Chambon (XVIe-XVIIIe siècles), inscrit au titre des monuments historiques (voir ici), à 5 km sous les machines.
Une menace pour l’eau potable, les zones humides, les oiseaux et les forêts
Outre les impacts visuels, il faut également savoir que 2 des 5 machines envisagées seraient implantées dans les périmètres de protection rapprochés des captages d’eau potable de la commune de Bersac-sur-Rivalier et dans des zones humides riches en biodiversité.
De plus, il est avéré que les machines installées seraient en conflit avec des couloirs d’oiseaux migrateurs, ce qui a d’ailleurs déjà conduit le promoteur à passer d’un projet initial de 8 machines, à une demande d’autorisation ne portant plus que sur 5 (suppression des 2 éoliennes situées le plus à l’est et de celle la plus à l’ouest).
Ce couloir de migration aviaire, d’importance majeure, est connu par les naturalistes locaux pour accueillir annuellement entre 2,5 et 4,5 millions d’oiseaux, dont plusieurs espèces répertoriées comme sensibles à l’éolien (grue cendrée, pigeon ramier, milan royal et autres rapaces).
Néanmoins, il est évident que malgré la suppression de 3 éoliennes par rapport au projet initial, un risque important perdure vis-à-vis de l’avifaune, notamment par l’implantation d’une des machines au lieu-dit “le Puy de la Gude". Cette échancrure paysagère est en effet une zone majeure de passage d’un couloir migratoire : elle accueille à elle seule entre 600 000 et 800 000 oiseaux par an.
Enfin, le site choisi étant actuellement fortement boisé, d’importants travaux de défrichement seraient nécessaires, notamment sur des parcelles initialement boisées avec des financements publiques ...
Malgré une politique favorable au développement de l’éolien, l’actuel ministère de la transition écologique et solidaire considère toujours que l’impact paysager est un critère prépondérant dans l’acceptabilité d’un projet éolien, ce qui ne peut objectivement être le cas dans celui porté par EDPR à Bersac-sur-Rivalier, qui va même à l’encontre des recommandations du SRE du Limousin en la matière. Ce projet est, inversement, un parfait exemple du développement anarchique de l’éolien industriel sur notre territoire.
La mobilisation des associations pour l’enquête publique à venir
Plusieurs associations se mobilisent, dans la perspective de la future enquête publique relative à ce projet, pour faire entendre raison aux autorités et aux élus locaux.
Il faut refuser le sacrifice de nos territoires pour une idéologie imposée à marche forcée et vouée à l’échec, alors qu’il y a beaucoup d’autres alternatives, plus rationnelles, à mettre en place avant d’implanter des éoliennes industrielles en Limousin, en particulier la biomasse, dans cette région à forte activité agricole et sylvicole.
Xavier Martrenchard, pour l’association ADNE87
(1) Le schéma régional éolien du Limousin a été définitivement annulé fin 2016, à la suite de recours d’associations. Il n’a donc plus de valeur juridique et il n’existe plus de zone d’exclusion prédéfinie (chaque projet doit être étudié au cas par cas, quelle que soit le site d’implantation envisagé).