On se souvient que les référés de notre association visant à faire suspendre les travaux de destruction des cloisons d’origine des loges, remplacées par des panneaux en accordéon, le plus souvent repliés, avaient échoués au motif principal qu’ils ne satisfaisaient pas à la condition d’urgence propre à ces actions (voir ici).
L’affaire était appelée au fond le 29 septembre 2016 devant le Tribunal administratif, qui avait à se prononcer sur deux questions : d’une part sur la décision de l’Opéra de supprimer les cloisons d’origine, décision dont nous demandions l’annulation, d’autre part sur l’autorisation délivrée par la Direction régionale des affaires culturelles d’Île-de-France (DRAC), dont nous réclamions également l’invalidation, décision intervenue, souvenons-nous en, l’avant-veille de notre premier référé (voir ici) !
Le rapporteur public, à l’unisson de nos demandes, concluait à une double annulation.
La première décision rendue par le tribunal le 13 octobre 2016 annule effectivement la décision de l’Opéra de détruire les cloisons d’origine (une première pour cette institution), ce qui revient à considérer que des travaux illégaux ont été menés durant près de 6 mois, avant leur ratification par la DRAC, mise devant le fait accompli. Le tribunal considère ainsi que "la décision du directeur de l’Opéra national de Paris de procéder à l’enlèvement de certaines cloisons des loges sans avoir obtenu préalablement l’autorisation prévue à l’article L. 621-9 du code du patrimoine est irrégulière en droit, sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens des requêtes, [et doit] être annulée". L’Opéra national de Paris est, en outre, condamné à verser 3000 euros à Sites & Monuments au titre des frais de justice.
Cette décision est évidemment encourageante s’agissant du volet pénal de notre action (voir ici) pour lequel aucune régularisation a posteriori ne sera possible.
Lire la décision du 13 octobre 2016 relative à la décision de l’Opéra de détruire les cloisons
Le tribunal déboutait cependant, et contrairement aux conclusions du rapporteur public, notre association de sa demande d’annulation de l’autorisation donnée par la DRAC, s’alignant sur la volonté de la puissante administration de l’Opéra de Paris.
Nos arguments portaient, à la fois, sur la modification de l’acoustique et de l’aspect de la salle historique, arguments repoussés par le tribunal au motif que "l’administration pouvait tenir compte du fait que les cloisons pourront être laissées en place pendant les représentations si une dégradation acoustique non remédiable était constatée" et que "la possibilité de remettre rapidement en place les cloisons dans leur disposition d’origine" devait être prise en compte...
Lire la décision du 13 octobre 2016 relative à l’autorisation de la DRAC
Nous ferons évidemment appel de ce dernier jugement qui, suivant la thèse de la DRAC, consacre - au mieux et si l’on fait abstraction de la destruction des cloisons d’origine et de l’abaissement des plafonds de 20 cm - une notion de "monument en kit" ou de "monument à éclipses".
Rappelons que l’Opéra de Paris exploite par ailleurs une salle modulable, l’Opéra Bastille, l’Opéra Garnier étant son fleuron patrimonial. Doit-il être victime de son succès en devenant également modulable - pour gagner 30 nouveau sièges - au risque de tuer la poule aux œufs d’or ?