L’immeuble des 22-24 rue du Château témoigne d’une période clé de l’histoire industrielle de la ville.
Situé dans une rue historique, dont le nom évoque l’ancien château aujourd’hui disparu, il jouxte l’Hôtel de ville, monument classé et la Médiathèque, équipement culturel le plus fréquenté de la ville. André Diligent, emblématique maire de Roubaix est né au numéro 1 de cette rue.
L’immeuble lui-même, de style néo-classique, est la dernière « maison de fabricant » de la ville et donc un témoignage unique de l’industrie textile à Roubaix avant 1850. Pour mémoire, une maison de fabricant était en fait une maison de négoce où les fabricants venaient apporter leur production. Il correspond donc à une forme d’activité antérieure à la grande industrialisation. Dans un rapport rédigé sur cet immeuble on peut lire : « Nous sommes ici en plein centre-ville au cœur du site patrimonial remarquable (SPR) attribué par l’État en 2001 ; plusieurs entreprises dont la maison de confection textile Thieffry Frères fondée en 1837 sont installés dans ces immeubles. Ils avaient été érigés pour une activité économique ; ils sont à compter parmi les plus anciens dans ce quartier et dans la ville datant des années 1840 ; il s’agit d’un ancien comptoir de négoce contemporain de l’église Notre-Dame et de la filature Delattre présentant des décors similaires et de grande qualité. Il fait partie d’un petit corpus de bâtiments, certains prestigieux et protégés, érigés pour et par des personnalités de l’histoire de la ville ; ils sont des témoins précieux de ce qui a fait la réputation de la ville une cité qui s’est développée à la cadence de sa population laborieuse ».
Ce bâtiment est promis à la démolition à la suite d’un enchaînement d’erreurs et de négligences. Que s’est-il passé ?
- Nous sommes d’abord surpris du peu d’intérêt porté par l’architecte des bâtiments de France (ABF) à ce bâtiment qui comporte pourtant plusieurs caractéristiques intéressantes : maison de « fabricant », architecture néo-classique de qualité devenue localement rare, belle cour intérieure…
- Les élus d’opposition sont intervenus à trois reprises sur le sujet lors des conseils municipaux. L’élu responsable a rejeté la demande de préempter sous le double prétexte de l’absence de projet et du coût. Or, à plusieurs reprises, la Ville a préempté des bâtiments en vue d’un projet qui restait à définir, comme la friche Hibon, le bowling ou la Banque de France et du côté financier, elle pouvait solliciter l’établissement public foncier (EPF) pour acquérir cet immeuble. Elle avait d’ailleurs, en 2021, préempté un autre bâtiment de la rue pour y construire une résidence étudiante.
Vinci Immobilier a obtenu le 6 décembre 2021 un permis de construire pour le 22-24 de la rue du Château. Enfin placardé début février, il prévoit sur une hauteur de 21,94 m une résidence étudiante de 169 logements entrainant la démolition de 2 523 M2 à savoir l’importante maison de fabricant.
La logique aurait voulu que la ville maitrise l’ensemble de l’îlot grâce à une préemption. Elle aurait alors pu lancer un appel à projet pour la création d’une résidence étudiante respectueuse des bâtiments existants.
On apprend enfin que Vinci a déposé un permis de construire modificatif en mairie le 14 décembre 2022. Ce permis est actuellement à l’étude donc non consultable. Dès qu’il sera rendu public, tous les recours seront possibles.
Des actions ont été mises en œuvre pour sauver la maison de fabricant du 22-24 rue du Château :
- UNE LETTRE OUVERTE a été adressée à la Ville, à l’État, au ministère de la Culture pour demander de mettre en œuvre les mesures de sauvegarde qui s’imposent en gelant cette opération.
Elle est signée par des personnalités très diverses : Michel David, Conseiller municipal, initiateur de la pétition, Jean-François Boudailliez, ex-adjoint à la culture, Président de métropole.label.le, Véronique Lenglet, ancienne conseillère déléguée au patrimoine de Roubaix, Xavier Lepoutre, président des Amis du couvent des Clarisses, Gilles Maury, président de la Société d’émulation de Roubaix, maitre de conférences ENSAPL, architecte, Myriam Cau, urbaniste. - UNE PETITION est lancée pour s’opposer à la démolition, le grand nombre de signatures (plus de 1300 à mi-février) montre la forte mobilisation venue de tous horizons. Nous comptons sur votre mobilisation pour augmenter encore sa visibilité, signez la pétition
Anne de Cherisey, déléguée régionale Sites & Monuments des Hauts-de-France.
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